Le cyclone Béti Terres Métisses |
Béti, 1996
gouache sur papier affiche de récupération
notre maison est
comme un grand navire perdu dans la tempête
les grandes baies sont obturées par des
panneaux de bois
du côté où souffle le vent
sur les autres côtés,de grandes croix
d'adhésif d'emballage renforcent les vitres
pour résister aux assauts des bourrasques,
les cocotiers échevelés, ployant sous les rafales,
saluant presqu'à terre,
se tordant,
hurlent en brassant les averses,
la maison des voisins saura-telle résister?
l'hibiscus arraché,
l'eau qui coule en cascade du toit,
qui monte peu à peu ,emplit le paysage où l'on peut voir très loin,
des arbres sont tombés,
et de l'observatoire
où nous sommes à l'abri,
nous contemplons, béats,le vent et l'eau mêlés,
et cette grande plaine d'eau
qui remplace les arbustes
du petit bois d'en bas...
L'oeil du cyclone
j'attends l'oeil du cyclone,
quand ça s'arrêtera de souffler de pleuvoir,
de hurler, de claquer,quand le ciel sera bleu,
que le calme viendra,l'espace d'un instant,
quand tout sera serein,
depuis bien quatre jours nous n'avons pu bouger,
nous n'avons vu personne,
la radio, la télé, et l'électricité,
plus rien de tout cela,
nous sommes seuls au monde,
personne dans la rue,
les voisins sont cloîtrés
comme nous sommes nous,
enfermés,
attendant ,
prisonniers,
impuissants,
j'ai sorti des pinceaux, trouvé
de petits tubes de gouache,
et au dos des affiches,
j'ai tenté d'oublier
tout ce qui m'entourait,
et cette peur au ventre,
ces hurlements de monstre,
ces nuits de mon enfance,
cette immense petitesse d'être humain que je suis
j'ai laissé le pinceau tracer de grands cerceaux,
les arbres qui se couchaient,
qui perdaient leurs perruques,
et dans l'oeil du cyclône,
des oiseaux projetés,
avec le paysage qui
n'avait plus de sens.....
Polani dit :
25/4/2013
C'est si vivant et si bien écrit qu'on s'y croirait et ça fait froid dans le dos !
Superbe témoignage !
Amitiés Biz Annie