Notre première île, la Petite Terre |
Pendant un an, nous avons vécu en Petite Terre, à Dzaoudzi, des conditions de vie très particulières, à la fois difficiles et merveilleuses. Avec nos enfants, tout devenait différent , ce n'était plus l'insouciance du Tchad. Tout comme nous, ils avaient tout à reconstruire, ils ne disposaient d'aucun confort, ils devaient apprendre à vivre autrement. Il n'y avait pas d'école maternelle pour notre plus jeune fils, notre fils aîné regrettait ses copains et son chat. Les bagages avec les jouets, les jeux, les livres, le minimum que nous ayions pu emmener pour notre quotidien, ainsi que notre voiture et notre Zodiac n'arrivaient pas, le bateau ayant pris beaucoup de retard. Il n'y avait ni radio ni télévision. Notre logement était très incorrect, quoique nous ayions eu la chance d'être logés, certains collègues devant cohabiter dans une "case de passage". Quant à la nourriture, elle n'avait rien de commun avec ce que nous connaissions.Tout venait soit de métropole par avion, soit de La Réunion par bateau à des prix trés élevés. Il nous fallut donc nous habituer aux produits locaux que nous ne savions pas cuisiner. Nous nous habituâmes aux frites d'igname et de manioc, au "frlaaappé", que plus tard nous prononçâmes enfin correctement "fruit à pain" après nous être aperçus que nous amusions les autres "métros" avec cette appellation!Pour corser le tout, quelques jours après notre arrivée, nous devions être confrontés à une pénurie de farine et de gaz qui dura quelques semaines!
Notre "case" à Dzaoudzi, la première année, un ancien bureau de poste transformé en logement, à côté des bâtiments de la Marine Nationale. Les marins se prirent d'affection pour nos deux fils, les chouchoutant comme leurs propres enfants. Souvent, ils nous rendaient service, ramenant quelques courses lors de leurs déplacements à La Réunion. Ils avaient trois ou quatre chiens fous de promenades en Méhari qui faisaient la joie de nos gamins tellement ils étaient comiques.
Souvent, nous allions à la plage des tortues, à Moya,* un lieu que nous fréquentions souvent pour la baignade et la promenade, éloignée des zones habitées, accessible par une piste desservant la "campagne", espace de cultures disséminées parmi les brousses, sans aucune clôture: quelques plants de manioc, un ou deux ananas, une touffe de bananiers... qui semblent plus pousser naturellement que plantés volontairement par l'homme.
Quand nous accédions à cette plage, il n'était pas rare de découvrir une tortue retournée, avec des chapelets d'oeufs sur le sable.Des braconniers en prélevaient la carapace pour la vendre. Il n'était pas encore question à cette époque de protection des espèces. Le préfet partait seul observer les lieux de ponte .Aucune réglementation ne protégeait alors le lagon.
Beaucoup de mes élèves habitaient Pamandzi, un village où j'aimais faire quelques achats, près des marchandes qui installaient leur petite récolte au seuil de leur case.Sur le toit de paille, elles mettaient le linge à sécher, après l'avoir lavé dans le lagon. Cela amenait des touches de couleurs très gaies sur l'ocre des murs .
Quand nous souffrions trop de la chaleur, nous allions nous baigner à la plage de Moriombeni, en face de l'école où j'enseignais. C'est sur cette plage que les élèves jouaient au ballon avec ...des noix de coco pendant les séances d'éducation physique, qui ne figuraient pas au programme.